Les glycopeptides sont une classe d’antibiotiques puissants utilisés principalement pour traiter des infections graves causées par des bactéries Gram-positives, en particulier lorsque d’autres antibiotiques ne sont pas efficaces. Les glycopeptides, tels que la vancomycine et la téicoplanine, sont souvent utilisés en milieu hospitalier pour des infections qui résistent aux traitements habituels. Cet article explore l’histoire des glycopeptides, leur mécanisme d’action, leurs utilisations médicales, ainsi que les défis posés par la résistance.
L’Histoire des Glycopeptides
La vancomycine est le premier antibiotique de la classe des glycopeptides à avoir été découvert. Elle a été isolée en 1956 à partir de la bactérie Amycolatopsis orientalis (anciennement Streptomyces orientalis). La vancomycine est rapidement devenue un outil essentiel pour traiter les infections à Staphylococcus aureus résistants à la pénicilline.
Dans les années 1980, un autre glycopeptide, la téicoplanine, a été introduit sur le marché. La téicoplanine possède des caractéristiques pharmacologiques légèrement différentes de celles de la vancomycine, notamment une demi-vie plus longue, ce qui permet de l’administrer moins fréquemment.
Mécanisme d’Action des Glycopeptides
Les glycopeptides agissent en inhibant la synthèse de la paroi cellulaire des bactéries Gram-positives. Plus précisément, ils se lient aux précurseurs de la paroi cellulaire, les peptidoglycanes, empêchant ainsi leur assemblage. La paroi cellulaire est essentielle pour maintenir la rigidité et l’intégrité de la cellule bactérienne, et sans elle, la bactérie devient vulnérable et finit par mourir.
Ce mécanisme est efficace contre les bactéries Gram-positives, car celles-ci possèdent une paroi épaisse et riche en peptidoglycanes. Les glycopeptides sont particulièrement utilisés pour traiter les infections causées par des bactéries résistantes aux bêta-lactamines, telles que Staphylococcus aureus résistant à la méthicilline (SARM) et Enterococcus faecium résistant aux antibiotiques classiques.
Les Différents Types de Glycopeptides
Vancomycine
La vancomycine est le glycopeptide le plus couramment utilisé. Elle est souvent administrée par voie intraveineuse pour traiter des infections graves, notamment les endocardites, les infections osseuses (ostéomyélites), et les septicémies causées par des bactéries Gram-positives résistantes.
Téicoplanine
La téicoplanine est un autre glycopeptide qui possède une demi-vie plus longue que la vancomycine, ce qui permet de l’administrer une fois par jour. Elle est utilisée pour des indications similaires à celles de la vancomycine et est souvent choisie en raison de sa meilleure tolérance.
Dalbavancine et Oritavancine
Plus récemment, des glycopeptides de nouvelle génération, tels que la dalbavancine et l’oritavancine, ont été développés. Ces antibiotiques ont des demi-vies très longues, permettant des schémas posologiques plus pratiques, souvent une injection unique ou hebdomadaire, ce qui est particulièrement utile pour le traitement en ambulatoire.
Utilisations Médicales des Glycopeptides
Les glycopeptides sont utilisés principalement pour traiter des infections graves causées par des bactéries Gram-positives, en particulier lorsque d’autres antibiotiques ne sont pas efficaces. Voici quelques-unes des principales indications des glycopeptides :
- Infections à Staphylococcus aureus résistant à la méthicilline (SARM) : Les glycopeptides sont souvent le traitement de choix pour les infections graves causées par des SARM, y compris les infections des voies respiratoires, des os, et du sang.
- Endocardite infectieuse : La vancomycine est fréquemment utilisée pour traiter les infections des valves cardiaques causées par des bactéries Gram-positives résistantes.
- Infections des tissus mous et des os : telles que les ostéomyélites et les infections des plaies chirurgicales, en particulier lorsque les autres antibiotiques ne fonctionnent pas.
- Colite à Clostridium difficile : La vancomycine est parfois administrée par voie orale pour traiter les infections à Clostridium difficile, une bactérie qui cause des diarrhées sévères, notamment après l’utilisation d’autres antibiotiques.
La Résistance aux Glycopeptides
Mécanismes de Résistance
Bien que la résistance aux glycopeptides soit relativement rare, certains mécanismes permettent aux bactéries de devenir résistantes, notamment :
- Modification des précurseurs du peptidoglycane : Certaines bactéries modifient les précurseurs de la paroi cellulaire, empêchant ainsi les glycopeptides de s’y lier efficacement. Ce mécanisme est observé chez des souches d’Enterococcus appelées ERV (Enterococcus résistant à la vancomycine).
- Épaississement de la paroi cellulaire : Certaines souches de Staphylococcus aureus peuvent épaissir leur paroi cellulaire, rendant l’accès aux cibles des glycopeptides plus difficile.
Ces résistances posent un problème clinique important, car elles limitent les options thérapeutiques pour traiter des infections graves.
Perspectives d’Avenir et Utilisation Rationnelle
Pour lutter contre l’émergence de résistances aux glycopeptides, il est essentiel d’en faire un usage raisonné et approprié. Cela inclut :
- Limiter l’utilisation des glycopeptides aux situations où aucun autre antibiotique n’est efficace.
- Surveiller les taux sériques de vancomycine pour s’assurer que les concentrations atteignent des niveaux efficaces tout en minimisant les risques de toxicité.
La recherche continue pour développer de nouveaux glycopeptides ou des composés similaires capables de contourner les mécanismes de résistance existants. L’arrivée de nouvelles molécules comme la dalbavancine et l’oritavancine offre de nouvelles perspectives pour traiter les infections résistantes.
Conclusion
Les glycopeptides sont des antibiotiques puissants, essentiels pour le traitement des infections graves causées par des bactéries Gram-positives résistantes. Leur efficacité contre des souches telles que les SARM et les ERV en fait des outils précieux en milieu hospitalier. Cependant, pour préserver leur efficacité, il est crucial de les utiliser de manière judicieuse et de surveiller attentivement les patients pendant le traitement. La vancomycine, la téicoplanine, ainsi que des glycopeptides de nouvelle génération comme la dalbavancine, continuent de jouer un rôle clé dans la prise en charge des infections sévères.
Sources :
- Preobrazhenskaya, M., & Olsufyeva, E. N. (2004). Patents on glycopeptides of the vancomycin family and their derivatives as antimicrobials. Expert Opinion on Therapeutic Patents, 14(2), 141-173.
Lien vers l’article - Reynolds, P. (1989). Structure, biochemistry and mechanism of action of glycopeptide antibiotics. European Journal of Clinical Microbiology and Infectious Diseases, 8, 943-950.
Lien vers l’article - Murphy, S., & Pinney, R. (1995). Teicoplanin or vancomycin in the treatment of Gram-positive infections? Journal of Clinical Pharmacy and Therapeutics, 20.
Lien vers l’article - Novotna, G., Hill, C., Vincent, K., Liu, C., & Hong, H. (2012). A Novel Membrane Protein, VanJ, Conferring Resistance to Teicoplanin. Antimicrobial Agents and Chemotherapy, 56(4), 1784-1796.
Lien vers l’article - Shlaes, D., & Rice, L. (1994). Bacterial resistance to the cyclic glycopeptides. Trends in microbiology, 2(10), 385-388.
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